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Compte rendu du 26ème atelier du CLIC, consacré à l’édition muséale et patrimoniale

24 décembre 2014

L’Hadopi était invitée ce jeudi 18 décembre 2014 à venir présenter l’étude « des perceptions et usages du livre numérique » dans le cadre du 26ème atelier du CLIC, dont le thème était : « édition muséale et patrimoniale : gérer la transition/migration numérique". Retour sur une série de conférences riches en informations.

A l’initiative de son administrateur, Pierre-Yves Lochon (voir notre interview par ailleurs), le Club Innovation & Culture France (CLIC) donnait donc rendez-vous à une quarantaine de professionnels des mondes de la culture, des médias et de la communication au sein de la Cité des Sciences, afin d’élargir les discussions autour de l’édition muséale et patrimoniale.

Afin de cadrer le propos des différents intervenants, c’est Flore Piacentino, chargée de mission numérique pour le Syndicat National de l’Edition qui entame les présentations. Elle propose différentes informations autour du secteur « art et beaux livres ». Parmi les chiffres à noter, nous apprenons que pas moins de 8000 nouveaux livres sont sortis dans cette catégorie en 2013, représentant 1,6% de la production éditoriale française et 3% en termes de chiffre d’affaire. Le numérique, quant à lui, est en forte augmentation pour ce type de livres. Plusieurs questions se posent alors quant à la mise en ligne et la diffusion (mais aussi ses moyens de protection) de ces ouvrages. Différents langages et protocoles sont présentés, parmi lesquels les standards W3C, les langages CIDOC/CRM. La présentation fixe également les bases de futures classifications autour du web sémantique et des objets connectés, qui pourraient bouleverser les normes établies aujourd’hui. La question des formats des fichiers est aussi abordée, Flore Piacentino détaillant les principales différences entre applications, sites et ebooks, insistant en particulier sur le format ePub et l’arrivée de l’ePub 3.

C’est Marianne Serfaty qui prend ensuite la parole pour l’Hadopi, présentant les principaux enseignements de l’étude « des perceptions et usages du livre numérique », en compagnie de Benoit de la Bourdonnaye, président du GLN et partenaire de l'Hadopi dans la réalisation de cette étude. Plusieurs points sont mentionnés sur la question des terminaux utilisés pour la lecture, la perception des prix au regard des attentes du public et les avantages et inconvénients des livres numériques pour les lecteurs. Enfin une partie de l'étude détaille comment est perçue l'expérience d'achat sur les plateformes d'ebooks et le niveau d'intérêt pour des offres telles que le livre enrichi ou le couplage des versions imprimée et numérique. Benoit de la Bourdonnaye rappelle de son côté la gratuité, l'indépendance et l'aspect complet de l’étude proposée en libre accès.

Une nouvelle partie de l’atelier fait intervenir deux représentants d’institutions muséales. La première est le musée du Jeu de Paume, représenté par Muriel Rausch, responsable des éditions, rappelant au passage que le musée, dédié à l’image et fêtant ses 10 ans, ne dispose pas de collections permanentes. En mentionnant notamment deux applications, l’une réalisée pour l’exposition Winogrand, l’autre pour l’exposition Inventer le possible (application payante) et constituée de vidéos, Murielle Rausch relie l’utilisation des applications et les jours d’ouvertures du musée. Ainsi, les deux applications, démontrent un intérêt supérieur in situ, tenant parfois lieu de catalogue d’exposition pour le musée.

C’est ensuite Thomas Bijon, le responsable epublishing pour la Réunion des Musées Nationaux et du Grand Palais des Champs-Élysées (RMN-GP) qui fait part de son expérience. Il rappelle qu’en tant qu’insitution publique, la RMN est un des principaux éditeurs de livres d’art en Europe. Il défend l’idée selon laquelle les catalogues d’exposition papiers sont identique sur les tablettes, avec la possibilité de pouvoir zoomer sur les contenus iconographiques. Ainsi, l’exposition Monet a permis de vendre plus de 6000 catalogues numériques. Aujourd’hui, la RMN propose 36 titres au format numérique, équivalent à plus de 100 références avec les spécificités techniques et linguistiques de chaque titre. Thomas Bijon parle concrètement des problèmes de rentabilité et de retour sur investissement auquel ces développements sont liés, centrant son attention sur les usages actuels des utilisateurs. Les coûts de droits iconographiques représentent d’ailleurs un investissement conséquent pour chaque édition et le fait de coupler les demandes print/numérique permet d’ailleurs de réaliser des économies.

Jean-Luc Lemaire parle en premier d’Art Book Magazine (ABM), dont il est directeur général. Créé en 2010, ABM est une librairie numérique prenant la forme d’une application gratuite disponible sur iPad, se consacrant à l’art contemporain, la photographie, l’architecture, le design graphique, la typographie, les sciences sociales, la littérature ou encore la culture numérique. ABM, en travaillant avec un studio graphique intégré, souhaite retrouver la qualité du papier dans des formats numériques, notamment en enrichissant les éditions de contenus supplémentaires. Jean-Luc Lemaire prend notamment pour exemple la monographie éditée dans le cadre de la résidence de Claude Lévèque au Musée du Louvre, intégrant de nombreux liens et des entretiens filmés en plus des textes et images.

Enfin, Dominique Tourte, le PDG de l’agence de communication Invenit est venu de Tourcoing présenter les éditions Invenit, spécialisées dans les catalogues d’expositions, les livres d’artistes et autres réalisations liées aux beaux livres. La maison d’édition est notamment lauréate du Pôle Numérique Culturel Louvre-Lens Vallée et du fond Expériences Interactives de Pictanovo (la communauté de l’image en Nord-Pas de Calais). Dominique Tourte présente notamment deux projets. Le premier, intitulé « récit d’objets » et proposé dans le cadre de l’ouverture du Musée des Confluences à Lyon, invite des auteurs à écrire un court texte autour d’une œuvre du musée. Le livre qui en découle est ensuite enrichi de réalité augmentée (procédé permettant via une application de faire apparaître des éléments virtuels en 2D/3D à partir d’éléments papiers) proposant des modélisations 3D des objets, mais également de vidéos et d’un portail de chroniques en ligne. L’autre projet, aujourd’hui encore au stade de prototype est intitulé « La Fabuleuse Aventure de l’Imprimerie », dédié aux Incunables (ces ouvrages imprimé en Europe avec des caractères mobiles avant le 1er janvier 1501). Il s’agit d’un livre augmenté, doublé d’une application, mettant le jeune lecteur dans la peau d’un apprenti imprimeur devant réaliser un Incunable. Equipé de sa tablette, il pourra alors découvrir un serious game fait à partir de réalité augmentée prévue via l’impression papier et une application spécifique. L’enfant pourra ainsi découvrir de manière ludique le processus de création d’un tel livre.

En définitive, différentes questions auront sous-tendu les interventions de cet atelier, du coût de fabrication au choix de formats de diffusion de ces livres numériques. Surtout, il semble aujourd’hui fondamental de réfléchir au mieux aux attentes des utilisateurs via ce type de média et au développement des usages. Un beau livre semble difficilement convertible sans perte au format numérique et ce dernier se doit donc de proposer un contenu enrichi ou pour le moins différent, capable toutefois d’aller au-delà des possibilités proposées par Internet. Surtout, un nouveau modèle tend à émerger, proposant une coexistence des deux formats – livres imprimés et « livres » numériques – l’association des deux formats permettant une complémentarité, voir une nouvelle lecture de données, via, par exemple, l’utilisation de la réalité augmentée.

Pour en savoir plus sur le projet « La Fabuleuse Aventure de l’Imprimerie » :